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NON à la violence, OUI à un dialogue sincère

Au nom du Mouvement Démocrate de la Sarthe, je tiens à condamner les incidents survenus lors des vœux du Maire du Mans samedi 26 janvier dernier.

Ce ne sont pas les premiers faits de violence depuis le début du mouvement des « gilets jaunes », mais ce grave dérapage est symptomatique de l’impasse dans laquelle certains voudraient s’enliser. Il constitue une atteinte à l’idée même de démocratie, par le refus du dialogue pourtant proposé par le Maire du Mans Stéphane LE FOLL.

Les citoyens sont en droit d’exprimer leur colère. Sur le fond, nombre de leurs revendications sont entendables et légitimes. Mais sur la forme, des modes d’expression et d’action inadaptés, voire parfois violents, conduisent à exacerber les tensions et l’incompréhension.

La parole des gilets jaunes pacifistes et attachés à l’esprit de la République en devient inaudible, tant elle est polluée, à la fois par une frange radicalisée et par une minorité de casseurs, auxquels se mélangent ceux qui viennent uniquement animés par la haine et le goût de la violence gratuite, sans réel attachement au vrai combat des gilets jaunes. Pour ceux-là, la « loi anti-casseurs » présentée cette semaine à l’Assemblée dans sa nouvelle version, apporte une réponse de fermeté indispensable.

Au plus dur de cette crise, notre mouvement départemental n’a pas souhaité adopter une posture réactionnaire, ni de simple commentaire (d’autres s’en sont chargés…). D’autant que les revendications des gilets jaunes ont évolué au fil des semaines. Nous démocrates, avons fait le choix de la sagesse, de l’écoute et de la réflexion partagée. Et plus que tout, nous avons refusé de surfer sur les évènements pour faire de la récupération politique.

Cette prise de recul nous permet de nous exprimer aujourd’hui de la façon la plus juste possible et avec humilité, car nous ne prétendons pas détenir la vérité, ni les solutions immédiates à tous les problèmes du pays.

Mais nous pouvons nous interroger : quelles leçons tirons-nous de cette crise, qui n’est pas terminée, et dont les enjeux appellent à un sursaut constructif ?

Nous avons écouté les gilets jaunes. Vendredi dernier encore, soucieux de ce nécessaire dialogue, je suis allé rencontrer ceux qui manifestent depuis maintenant 11 semaines aux abords du rond-point de Maresché à Beaumont-sur-Sarthe. Leurs attentes premières demeurent les suivantes :
– Plus de pouvoir d’achat pour les français modestes, notamment ceux qui travaillent et sont en difficulté pour boucler les fins de mois.
– Plus de pouvoir d’agir, de décider (à travers le RIC par exemple) et donc plus de considération de l’Etat pour « la base ».
– Plus de justice sociale et fiscale, pour réduire des inégalités criantes entre les territoires ruraux et les métropoles, entre les français les plus modestes et les plus riches.

Face à ces constats, nous centristes pouvons ressentir un sentiment de gâchis.

En effet, le MoDem soutient l’action du gouvernement pour réformer notre pays. Mais nous avons très tôt alerté le gouvernement sur le déséquilibre que nous constations sur la politique menée lors des premiers mois du quinquennat.

Le premier signal d’alerte a été la suppression de l’ISF, qui cristallise aujourd’hui les tensions. Les dirigeants et de nombreux élus de notre mouvement avaient alors émis des réserves fortes à ce sujet, auxquelles le gouvernement et nos alliés LREM répondaient que cette mesure voulue pour une relance de l’investissement serait par ailleurs équilibrée par des mesures sociales. Ce « en même temps » est la base de notre alliance, dans le respect du projet présidentiel porté par Emmanuel MACRON. Or, si nous avons soutenu et salué des mesures attendues en faveur de la croissance et de l’emploi, « la jambe sociale » est restée insuffisante, avec des mesures tardives. Le plan pauvreté par exemple, bien que salué par la plupart des associations de terrain, a été présenté 15 mois après le début du quinquennat. La suppression de l’ISF aurait plus acceptable si cela avait eu lieu « en même temps » et en étant pensée plutôt sur un mode d’exonération soumis à conditions.

Nous ne doutons pas que le gouvernement porte le souci de la classe moyenne et des personnes en situation de précarité. Mais au final, les choix stratégiques de l’exécutif ont installé dans l’opinion l’idée que l’on faisait des cadeaux aux riches, quand on demandait des efforts aux modestes (baisse de 5€ sur les APL, hausse de la CSG pour les retraités).

A cela, s’est ajouté des fautes de communication qui ont conduit à donner le sentiment d’un mépris pour certains français. Nous-mêmes, bien que soutenant l’action du Président de la République, avons parfois été choqués de certaines formules malheureuses. Alors comment pourrait-il en être autrement pour ceux qui ne partagent pas nos convictions et/ou se sentent abandonnés ?

Nos 47 députés, sans jamais entrer sur la voie de la fronde (ce qui a pourri le quinquennat précédent), sont régulièrement montés au créneau, discrètement, mais activement. Fidèles aux valeurs de solidarité que nous portons au cœur de notre projet démocrate, leur position à l’égard du gouvernement était et demeure très claire : « loyauté et exigence ».

Lors de notre Université de rentrée en septembre dernier, nous avons accueilli Christophe CASTANER, qui était encore Secrétaire d’Etat aux relations avec le Parlement et Délégué général d’En Marche. A la tribune, nous avons entendu son mea culpa à l’adresse du MoDem, reconnaissant ne pas nous avoir suffisamment écoutés et considérés. C’est d’ailleurs ce qui avait conduit au score exceptionnel de Marc FESNEAU lors de l’élection à la Présidence de l’Assemblée, révélant le malaise qui s’était installé au sein même des rangs LREM, tandis que nos parlementaires étaient reconnus pour porter un discours lucide sur la situation et ne pas rester « le doigt sur la couture du pantalon ».

Le gouvernement a compris ses erreurs, mais sans doute trop tard et sans en mesurer la portée. Le mouvement des « gilets jaunes », c’est l’expression de beaucoup d’enjeux que le Président et le gouvernement n’ont pas entendu.

Certes, le MoDem ne les avait pas tous cernés, mais une bonne partie…

On peut nous reconnaître aujourd’hui la clairvoyance et la cohérence qui ont été les nôtres, y compris dans les positions de notre mouvement local : sur les 80kms/h, sur la fiscalité écologique à la veille de la crise des gilets jaunes, et même sur le projet de Béner, lequel a suscité ces derniers jours des prises de positions de la part de politiques de bords différents et qui mettent en avant le manque de consultation des citoyens.

Beaucoup d’entre nous ont donc éprouvé un sentiment d’amertume lorsque la crise a éclaté et aujourd’hui une impression de gâchis, mais qu’il nous faut absolument désormais dépasser.

Les questions sont devant nous. Comment concilier les enjeux économiques et environnementaux, qui exigent des choix parfois lourds de conséquence, si les citoyens ne sont pas écoutés, associés, impliqués dans les orientations prises ?

Et pour y parvenir, comment retrouver un véritable dialogue ?

Tout d’abord, sortons des caricatures :
Pour les uns, reconnaître que la majorité des gilets jaunes ne sont pas des extrémistes et portent des revendications légitimes.
Pour les autres, admettre que le gouvernement et les parlementaires de la majorité ne sont pas des cyniques au service du grand capital, que des mesures positives ont été prises (suppression des cotisations chômage et assurance maladie, de la taxe d’habitation, …) ainsi que les 10 milliards d’euros alloués au cœur de la crise et qui sont une réponse, peut-être insuffisante, mais concrète.
Et redonner place aux corps intermédiaires (élus, syndicats, partis) qui ont pu être déconsidérés ces derniers temps.

Chacun doit faire un pas vers l’autre.
Le Président et le gouvernement doivent non seulement écouter, mais tenir compte de ce qui, au cœur de la société, met en souffrance trop de nos concitoyens.
Les partis d’opposition doivent se montrer à la hauteur de l’enjeu en faisant preuve de responsabilité pour apaiser les tensions. (Je salue sur ce point les positions récentes de plusieurs élus sarthois).
Les gilets jaunes et l’ensemble des citoyens qui se questionnent sur leur avenir et celui de leurs enfants ont tout intérêt à accepter le dialogue, en prenant part au Grand Débat, mais aussi en traduisant leur élan premier par différentes formes d’engagement.

Car tout ne pourra pas (et ne doit pas) venir seulement de l’Etat. Chaque citoyen est invité à prendre sa part, à la mesure de ce qu’il peut faire. Beaucoup d’entre nous, au MoDem72 ainsi que dans les autres partis politiques, sont impliqués concrètement pour agir : comme élus locaux, comme bénévoles dans le secteur associatif auprès des personnes précaires, des réfugiés, des personnes handicapées…

Pour relever les principaux défis qui sont devant nous, plus que jamais, nous devrions pouvoir nous mettre ensemble autour de la table, relever les manches, dépasser les clivages. C’est l’ADN même du Mouvement Démocrate : l’ouverture dans le pluralisme pour agir de manière pragmatique et non idéologique, dans le sens de l’intérêt commun.

Notre pays a besoin que nous allions de l’avant. Les français ont le droit de vivre dignement, dans un climat apaisé.

Le MoDem72 participera donc également à ce Grand Débat National, sous une forme qui sera validée très prochainement, à la suite de notre Conseil national à Paris ce samedi et de la prochaine réunion des adhérents sarthois.

Loïc BLANCHARD
Président
MoDem 72